Projet de loi 81 : l'AQPP partage l'objectif du gouvernement, mais doute que les appels d'offres soient la meilleure manière d'y arriver
QUÉBEC, le 9 mars 2016 /CNW Telbec/ - L'Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) croit que le coût des médicaments au Québec pourrait être réduit, mais que la solution proposée par le gouvernement comporte trop de risques par rapport aux bénéfices espérés. Dans le cadre de la commission parlementaire étudiant le projet de loi 81 (PL 81) sur les appels d'offres de médicaments génériques, le président de l'AQPP, Jean Thiffault, a recommandé au gouvernement de surseoir à ce projet de loi pour plutôt miser sur des approches plus porteuses afin de réaliser des économies.
Pénurie de médicaments et autres risques
L'AQPP a rappelé que les systèmes d'appels d'offres sont associés à des risques bien réels, évoqués par plusieurs études réalisées au Canada et ailleurs dans le monde :
- Des problèmes d'approvisionnement, pouvant aller jusqu'à de sévères pénuries de médicaments.
- À terme, une diminution du nombre de fabricants présents sur un marché, faisant diminuer la concurrence qu'on voulait précisément favoriser.
- Une insécurité et une confusion chez plusieurs patients engendrées par le changement de marque et d'apparence des médicaments à la suite d'un changement de fournisseur.
Les appels d'offres de grossistes sont irréalistes
L'AQPP s'est opposée fermement aux appels d'offres visant les grossistes. Elle n'a connaissance d'aucune procédure semblable dans d'autres pays. Et pour cause : aucun grossiste ne pourrait desservir efficacement l'ensemble des pharmaciens du Québec pour un nombre limité de produits.
Tabler sur la tarification dégressive et d'autres solutions
La seule mesure ayant permis de diminuer le coût des médicaments tout en évitant les risques mentionnés précédemment est la tarification dégressive. Cette approche prévoit que le prix d'un médicament générique soit fixé à partir d'un pourcentage du prix d'un médicament d'origine, tout en laissant jouer la concurrence entre les fabricants : une mesure pratiquée avec succès dans plusieurs pays du monde et d'ailleurs prônée par l'Alliance pancanadienne pharmaceutique que le Québec a jointe l'automne dernier. Cette stratégie a été utilisée avec succès au Canada depuis 2010 et l'AQPP croit qu'elle est garante d'économies récurrentes, tangibles et réalistes. L'AQPP propose aussi dans son mémoire plusieurs solutions porteuses à court, moyen et long terme pour générer des économies et optimiser l'usage des médicaments.
Instabilité dans le milieu de la pharmacie
Par ailleurs, l'AQPP a profité de son passage devant les parlementaires pour rappeler le contexte instable dans lequel se trouvent actuellement les pharmaciens communautaires : ceux-ci ont contribué à l'effort budgétaire du gouvernement en signant, en juin dernier, une entente par laquelle ils s'engageaient à verser au gouvernement 400 M$ en trois ans. Depuis septembre, près de 50 M$ ont ainsi été versés. Or, la mesure compensatoire prévue dans la même entente, soit le déplafonnement des allocations professionnelles, n'est toujours pas en place, plus de cinq mois après le début des versements.
Baisse marquée des services aux patients
« Ce délai indu a des conséquences à la grandeur du Québec sur les pharmacies et les services pharmaceutiques de première ligne aux patients, dans lesquels les allocations professionnelles doivent obligatoirement être investies », déplore Jean Thiffault. En effet, dans un sondage Léger que l'AQPP vient de rendre public, on apprend que :
- 3 545 heures d'ouverture hebdomadaires ont été coupées;
- Plus d'une pharmacie sur deux (53 %) a dû réduire le nombre d'heures en officine de ses pharmaciens;
- Près d'une pharmacie sur deux (45 %) a réduit les heures travaillées par les autres membres du personnel, dont les assistants techniques et les infirmières;
- Au total, l'équivalent de 934 postes à temps plein a été coupé en moins de six mois.
Pour plus d'information, consulter le communiqué de presse sur le sondage sur le site de l'AQPP, au www.monpharmacien.ca/medias.
Perturbation économique de la pharmacie
Avec l'instauration d'une procédure d'appels d'offres pour les fabricants de médicaments génériques, comme envisagé dans le PL 81, une partie des allocations professionnelles disparaîtrait purement et simplement. L'AQPP rappelle que les pharmaciens ne sont pas attachés à tout prix à ces allocations, eux qui souhaitent d'abord être rémunérés pour leur expertise et les services pharmaceutiques qu'ils rendent. Toutefois, dans le modèle actuel, ces allocations sont essentielles puisqu'elles contribuent à la rentabilité des pharmacies. « C'est pourquoi, si le gouvernement décidait d'aller de l'avant avec le projet de loi 81, il faudrait que le gouvernement s'engage à réinvestir des sommes suffisantes dans les services pharmaceutiques pour compenser adéquatement les répercussions qui en découleraient », affirme Jean Thiffault.
L'industrie de la pharmacie : un écosystème complexe
L'AQPP a profité de la commission parlementaire pour présenter dans son mémoire un portrait étoffé de l'économie de la pharmacie et du médicament d'ordonnance. Le pharmacien communautaire est le mieux placé pour témoigner de la complexité de son milieu et de l'interrelation existant entre tous les acteurs de l'industrie.
À propos de l'AQPP
L'Association québécoise des pharmaciens propriétaires est constituée en vertu de la Loi sur les syndicats professionnels et elle représente les 2 048 pharmaciens propriétaires des 1 866 pharmacies du Québec, qu'ils soient affiliés ou non à une chaîne ou à une bannière commerciale.
SOURCE Association québécoise des pharmaciens propriétaires
Pour information et demandes d'entrevue : Jean-Michel Nahas, CASACOM, [email protected], (514) 817-1185
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