Le Rapport annuel de l'enquêteur correctionnel de 2024-2025 préconise une réforme en profondeur des services de santé mentale dans les établissements correctionnels fédéraux English
OTTAWA, ON, le 12 nov. 2025 /CNW/ - Le rapport annuel 2024-2025 du Bureau de l'enquêteur correctionnel a été déposé au Parlement le 30 octobre 2025. Le 52e rapport annuel du Bureau présente les conclusions de six enquêtes nationales sur la qualité et l'accessibilité des services de santé mentale dans les établissements correctionnels fédéraux.
« Il ne fait aucun doute que le manque d'accès à des soins de santé mentale opportuns, adéquats et appropriés est une question de droits de la personne. D'après nos enquêtes, il est tout à fait clair que le Service correctionnel du Canada (SCC) n'est fondamentalement pas équipé pour fournir des soins de santé mentale à long terme aux personnes atteintes de maladies mentales graves, y compris celles qui souffrent de détresse psychiatrique aiguë, d'idéation suicidaire et d'automutilation chronique », a déclaré l'enquêteur correctionnel, le Dr Ivan Zinger.
Le Bureau signale que cinq centres régionaux de traitement (CTR) gérés par le SCC sont nettement en deçà des normes attendues des établissements hospitaliers thérapeutiques ou psychiatriques. Plusieurs sont obsolètes et mal équipés pour répondre aux besoins complexes des personnes atteintes de maladies mentales graves et fonctionnent de plus en plus comme des centres de détention pour une population carcérale vieillissante et médicalement vulnérable, plutôt que comme des lieux de soins, de traitement et de rétablissement. Comme l'a fait remarquer le Dr Zinger :
« Nous sommes face à un système qui n'a jamais été conçu pour répondre aux besoins des personnes atteintes de maladies mentales graves, et cela se voit. Ces établissements sont plutôt devenus des entrepôts pour des personnes vulnérables et vieillissantes, où des infrastructures désuètes et des approches axées sur la sécurité compromettent les soins, la dignité et le rétablissement des patients. »
Les constatations démontrent que les mesures axées sur la sécurité continuent de primer sur les soins cliniques, avec des exemples troublants de recours à la force, notamment au vaporisateur de poivre, pour interrompre des actes d'automutilation ou maîtriser des personnes en crise. Il en va de même pour l'application incohérente des politiques relatives à l'utilisation de mesures sévères telles que les contraintes Pinel et la surveillance anti-suicide. Les centres régionaux de traitement ne répondent pas aux normes de soins des hôpitaux psychiatriques communautaires, malgré leur désignation officielle et leur accréditation. L'inefficacité de ces établissements, dont les portes semblent simplement tourner en rond, est illustrée par le fait que la moitié de leurs patients reviennent, incapables de s'adapter aux pénitenciers standard. M. Zinger a renchéri en affirmant ce qui suit :
« J'ai demandé au SCC et au gouvernement du Canada de réformer en profondeur la façon dont les soins de santé mentale sont dispensés dans les établissements correctionnels fédéraux. Plutôt que d'investir 1,3 milliard de dollars dans de nouvelles infrastructures autonomes sur le site du pénitencier de Dorchester, les personnes atteintes de maladies mentales graves doivent être transférées vers des hôpitaux communautaires capables de leur fournir les soins spécialisés dont elles ont besoin. Le SCC ne devrait pas avoir pour mission de prendre en charge les patients atteints de maladies mentales aiguës ni les personnes en soins palliatifs et en fin de vie. »
L'examen par le Bureau de l'approche du SCC en matière de soutien aux personnes souffrant de déficits cognitifs a également révélé d'importantes lacunes. Des politiques obsolètes et vagues offrent peu d'orientations pratiques au personnel, tandis que des outils de dépistage inefficaces font que de nombreuses personnes sont complètement négligées. En conséquence, les personnes incarcérées au niveau fédéral n'ont pas accès à des évaluations et à des services appropriés, et finissent par être placées dans des établissements à sécurité renforcée et subissent des retards dans l'accès à la libération conditionnelle. Le SCC associe à tort les déficits cognitifs à des intentions malveillantes, à des comportements antisociaux, à des risques pour la sécurité et à la nécessité de mesures disciplinaires.
En dehors des murs de la prison, les personnes condamnées par les tribunaux fédéraux qui ont des besoins importants en matière de santé mentale sont également laissées pour compte. L'enquête a révélé que les services communautaires de santé mentale ont été progressivement érodés par des évaluations erronées, une mauvaise coordination entre les institutions et les prestataires communautaires, et un modèle de financement qui n'a pas suivi le rythme de l'inflation ou de la demande croissante de services. En raison de pratiques cliniques de congé largement inadéquates et dysfonctionnelles, de nombreuses personnes perdent brusquement accès aux soins à leur sortie de prison et se heurtent à de sérieux obstacles à leur réinsertion, notamment l'interruption de leur traitement médicamenteux, l'absence de papiers d'identité et l'instabilité de leur logement, ce qui est particulièrement difficile pour celles qui ont des besoins en matière de santé mentale. Cela représente à son tour un risque pour la sécurité publique, car les patients sont libérés sans les documents essentiels et les ressources nécessaires pour accéder aux services indispensables.
Trois enquêtes supplémentaires ont révélé des lacunes persistantes dans le système correctionnel fédéral. Il s'agit notamment de la stagnation des progrès dans le domaine des programmes thérapeutiques et de la prestation de soins de santé mentale intermédiaires, de l'insuffisance des soins tenant compte des traumatismes pour les femmes et du manque de services de santé mentale adaptés à la culture des détenus autochtones.
Le rapport contient au total 21 recommandations : 19 adressées au SCC et deux au ministre de la Sécurité publique. Les principales recommandations sont les suivantes :
- Réexamen par le gouvernement du Canada/ministre de la Sécurité publique de son récent investissement de 1,3 milliard de dollars dans un établissement de remplacement pour le CRT Atlantique. Les efforts et les fonds devraient plutôt être réorientés vers le transfert des personnes atteintes de troubles mentaux graves vers les hôpitaux psychiatriques provinciaux.
- Reprofilage des CRT en tant qu'établissements de soins de santé mentale intermédiaires offrant certains services d'urgence.
- Mise en place de politiques et de structures de gouvernance spécifiques pour les CRT, en veillant à ce que les décisions relatives à la santé soient prises par le personnel clinique plutôt que par les directeurs ou le personnel opérationnel.
- Examen des options de libération, par le ministre de la Sécurité publique, telles que la libération conditionnelle pour raisons médicales ou gériatriques, pour les personnes âgées et ayant purgé une longue peine qui ne présentent pas de risque excessif pour la sécurité publique. En outre, le SCC est encouragé à investir dans l'expansion des infrastructures correctionnelles communautaires, en mettant l'accent sur les établissements de soins de longue durée, les hospices et les maisons de retraite, dans le but de créer 200 lits en cinq ans.
- Amélioration de l'infrastructure institutionnelle dans les CRT, les centres thérapeutiques et les établissements de soins de santé mentale intermédiaires afin de favoriser un environnement plus propice à la thérapie.
- Définition et mise en œuvre d'une approche cohérente, complète, rapide et normalisée pour le dépistage et l'évaluation des personnes présentant des déficits cognitifs.
- Élaboration et mise en œuvre d'une stratégie complète et fondée sur des données probantes pour les services tenant compte des traumatismes et les traitements spécifiques aux traumatismes destinés aux femmes condamnées par les tribunaux fédéraux.
En tant qu'ombudsman pour les délinquants purgeant une peine fédérale, le Bureau de l'enquêteur correctionnel sert les Canadiens et contribue à la sécurité, à la légalité et à l'humanité du système correctionnel grâce à une surveillance indépendante du SCC, en menant des enquêtes accessibles, impartiales et rapides sur des préoccupations individuelles et systémiques. Le rapport annuel de 2024-2025 et un document d'information exhaustif sont disponibles à l'adresse www.oci-bec.gc.ca.
Citation
« Mon dernier rapport annuel en tant qu'enquêteur correctionnel porte sur les services de santé mentale dans les prisons, une question qui me préoccupe depuis le début de ma carrière professionnelle. Les conclusions présentées dans ce rapport réaffirment notre position de longue date : le SCC ne devrait pas se charger de fournir des soins psychiatriques spécialisés de longue durée. La manière dont nous prenons soin de ces personnes reflète qui nous sommes en tant que Canadiens. J'espère que les recommandations contenues dans ce rapport annuel donneront lieu à une réforme significative et à un engagement renouvelé à défendre la dignité et les droits fondamentaux des personnes détenues par le SCC. »
- Dr Ivan Zinger, enquêteur correctionnel
SOURCE Office of the Correctional Investigator

Personne-ressource (médias) : Valerie Phillips, Directrice exécutive, Courriel : [email protected]
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