Affaire Éric-Yvan Lemay : un jugement qui légitime la traque aux journalistes
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FEDERATION PROFESSIONNELLE DES JOURNALISTES DU QUEBEC03 févr, 2016, 16:44 ET
MONTRÉAL, le 3 févr. 2016 /CNW Telbec/ - La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) est hautement préoccupée par le jugement rendu par la Cour supérieure du Québec, le 22 janvier dernier, dans l'affaire de la perquisition menée par la Sûreté du Québec (SQ) au domicile du journaliste Éric-Yvan Lemay, du Journal de Montréal.
M. Lemay avait publié, en février 2012, un reportage démontrant qu'il avait facilement eu accès aux dossiers médicaux confidentiels de patients, laissés sans surveillance dans des corridors de plusieurs hôpitaux de la grande région de Montréal.
Quelques jours plus tard, des agents de la SQ ont pris le journaliste et sa conjointe en filature, puis perquisitionné son domicile - en présence de ses jeunes enfants - à la recherche d'éléments de preuve du « vol » de documents. Le Bureau du directeur des poursuites criminelles et pénales a finalement décidé de ne pas déposer d'accusations.
En refusant de sanctionner le comportement abusif des policiers provinciaux, la Cour supérieure crée un dangereux précédent qui vient légitimer la chasse aux journalistes et, par le fait même, à leurs sources.
Le juge Pierre Nollet estime que le fait que le journaliste ait agi dans l'intérêt public, en mettant au jour une déficience dans la protection des données personnelles des patients, ne change rien à l'affaire. Or, la FPJQ est précisément de l'avis contraire : ça change tout !
Voulons-nous d'une société qui traque les gens qui montrent du doigt ce qui ne tourne pas rond dans le but de l'améliorer ? La FPJQ estime que non et croit que les lois doivent au contraire protéger les sonneurs d'alarme.
Ce jugement ouvre la voie à la surveillance tous azimuts par les corps policiers des journalistes qui s'efforceraient de porter des cas de négligence à la connaissance du public, nuisant ainsi grandement à leur travail.
Certes, le juge Nollet reproche à la Sûreté du Québec de s'être fait juge et partie en publiant une vidéo pour tenter de justifier sa perquisition en invoquant maladroitement l'éthique journalistique. Le magistrat a condamné le corps policier à verser un dédommagement de 25 000 $ à Éric-Yvan Lemay pour diffamation.
Le cœur du problème n'est pourtant pas là, mais bien dans les techniques d'enquête abusives utilisées par la SQ, qui vient ainsi d'obtenir à bas prix une jurisprudence lui permettant de traquer les journalistes qui agissent dans l'intérêt public.
SOURCE FEDERATION PROFESSIONNELLE DES JOURNALISTES DU QUEBEC
Jean-Thomas Léveillé, vice-président de la FPJQ, 514 522-6142
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