Une égyptologue de l'UQAM dévoile le visage de la reine-pharaon Neferneferouaton, généré à l'aide de l'IA
MONTRÉAL, le 16 mai 2025 /CNW/ - Valérie Angenot, professeure au Département d'histoire de l'art de l'Université du Québec à Montréal (UQAM), a récemment dévoilé le visage de la reine-pharaon Neferneferouaton, lors d'un séminaire d'égyptologie à l'Université Paul Valéry Montpellier III (France).
Le séminaire portait sur l'identité controversée du « roi » féminin qui a succédé au pharaon hérétique Akhenaton et a précédé le jeune Toutankhamon sur le trône d'Égypte, au 14e siècle avant notre ère.
Un portrait réaliste de la reine produit par le biais de l'intelligence artificielle générative (IAG)
Malgré les nombreuses zones d'ombres qui entourent son règne, les égyptologues s'accordent pour dire que la tête royale de pharaon conservée au Kestner Museum de Hanovre (Allemagne) serait un des rares portraits connus de la reine-pharaon Neferneferouaton.
Afin d'appuyer ses théories relatives à l'identité de cette reine, Valérie Angenot a tenté de générer une version réaliste de la statue à l'aide de l'IA.
Pensant, de prime abord, que sa tâche serait relativement aisée, elle s'est finalement retrouvée confrontée à différents obstacles, qui l'ont contrainte à retravailler en profondeur le modèle généré par l'IA. Valérie Angenot nous explique les limites du recours à l'IAG dans le cadre de restitutions scientifiques, admettant néanmoins être novice dans ce genre de manipulations.
« J'ai tout d'abord dû faire face aux valeurs morales de l'intelligence artificielle (IA) américaine, incompatibles avec différents paramètres essentiels de ma requête. L'IA a, en effet, refusé de produire l'image réaliste d'une jeune fille mineure, fût-ce pour servir une visée scientifique. La jeune pharaonne devait avoir entre 11 et 14 ans quand elle est montée sur le trône, une donnée qui enfreint la politique de contenu de ChatGPT. L'IA juge également « irrespectueuse » l'association du critère « égyptienne » à celui de « jeune fille » ; un autre aspect de l'éthique contemporaine qui a contribué à mettre des bâtons dans les roues de la réalisation de ce projet », déclare la professeure.
Finalement, après plusieurs essais insatisfaisants sur différentes IAG, telles que Midjourney, Gemini et ChatGPT, ce dernier lui a généré l'image d'une femme mûre dont les traits globaux ressemblaient vaguement à ceux d'Akhenaton, tout en étant proches de ceux de la statue du Kestner.
« Résignée face à cet insuccès relatif, j'ai décidé de partir sur cette base pour produire un portrait réaliste qui soit exactement conforme aux traits de la sculpture de Hanovre, en m'aidant cette fois d'outils infographiques comme Photoshop », poursuit Valérie Angenot.
En dehors des questions éthiques, l'IAG a encore manifesté ses limites en se montrant incapable de produire une couronne et un uræus (cobra frontal) conformes à la réalité des artefacts archéologiques égyptiens, préférant s'appuyer sur des modèles fantasmés de l'Égypte ancienne. Pour cette partie, l'IA de Photoshop fut celle qui produisit les propositions les plus saugrenues, les autres étant tout simplement kitsches et fantaisistes.
« Je constate ainsi que, si l'IA est capable de fournir une base de travail plus ou moins acceptable, la chercheuse ou le chercheur sera néanmoins contraint de retravailler en profondeur les modèles générés, en exerçant son jugement et en intégrant son expertise au processus, pour espérer atteindre un résultat pertinent », ajoute la professeure.
Elle estime ce constat conforme aux observations qu'elle a pu faire en matière de productions textuelles de l'IA, qui ne parviennent guère encore, dans certains domaines scientifiques, à rivaliser avec ce que peut produire l'humain.
L'IAG demeure néanmoins un outil intéressant pour qui manque d'habileté en dessin réaliste. C'est en partie grâce à elle que la professeure Angenot a pu rendre une identité visuelle à cette reine-pharaon restée longtemps prisonnière des oubliettes de l'Histoire.
Les égyptologues divisés sur l'identité de la reine-pharaon Ankhkheperourê Neferneferouaton
Les égyptologues ne s'entendent pas sur l'identité exacte de la souveraine, dont les successeurs se sont efforcés d'effacer la mémoire, à l'issue de son court règne d'environ trois années.
Globalement, l'égyptologie anglophone considère que la reine-pharaon Neferneferouaton ne serait autre que Nefertiti, montée sur le trône comme pharaon à la mort de son époux Akhenaton. De son côté, l'égyptologie francophone a tendance à y reconnaître la fille aînée du couple, Meritaton, suivant en cela l'avis du professeur Marc Gabolde de l'Université Paul Valéry Montpellier III. Quant à la professeure Valérie Angenot, elle identifie cette reine à la princesse Neferneferouaton-Tacherit, une autre fille d'Akhenaton et Nefertiti.
Pour la professeure Angenot, fournir des chairs, des couleurs et un visage réaliste à cette statue permet déjà d'éliminer définitivement la candidature de Nefertiti, dont les traits reproduits dans son fameux buste de Berlin se distinguent formellement de ceux de la tête de Hanovre, notamment au niveau du nez, de la mâchoire et du menton. Cette tête a d'ailleurs longtemps été étiquetée comme étant celle d'un « jeune Akhenaton ». Et on a plus récemment argumenté qu'il s'agirait en fait, non pas d'Akhenaton, mais de Nefertiti. Ces hésitations ne sont pas surprenantes pour la professeure, qui soutient depuis plusieurs années déjà que le modèle vivant de la statue était en fait un mélange génétique d'Akhenaton et Nefertiti, à savoir une de leurs filles.
Le modèle réaliste produit par la rencontre de l'IA et de l'infographie met en évidence la ressemblance, subtile mais patente, de la jeune fille avec les portraits de ses deux célèbres parents.
La professeure Valérie Angenot du Département d'histoire de l'art est disponible pour accorder des entrevues.
Les photos sont disponibles sur demande ou sur la Salle de presse de l'UQAM.
SOURCE Université du Québec à Montréal

Source : Julie Meunier, Conseillère en communication, Division des relations avec la presse et événements spéciaux, Service des communications, Tel.: 514 987-3000, poste 1707, Cell.: 514 895-0134, [email protected]
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