Enquête indépendante sur l'événement survenu à Amos le 5 juillet 2021 : motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée
QUÉBEC, le 30 mai 2025 /CNW/ - Les procédures judiciaires étant terminées, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) expose les motifs l'ayant mené à conclure, dans son communiqué intérimaire du 5 janvier 2022, que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant les blessures subies par un homme à Amos le 5 juillet 2021.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révélait la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.
Événement
Le 5 juillet 2021, vers 20 h 05, une femme reçoit des messages textes d'un homme. Les propos sont inquiétants et suscitent la peur chez elle. L'homme est sous le coup d'un interdit de contact avec la femme à cette époque.
Un appel est fait au 911 et la police arrive sur place vers 21 h. L'homme est dans la rue à proximité de la résidence de la femme. L'enquête révélera qu'elle était sortie dehors pour aller à sa rencontre et qu'une altercation avait alors eu lieu. L'homme est retrouvé par les policiers non loin de son domicile. Il est mis en état d'arrestation pour bris de conditions et menaces envers la femme. Il coopère bien avec les policiers. Ceux-ci constatent qu'il est sous l'influence de l'alcool.
L'homme est amené au poste de la SQ par les policiers qui le placent en salle d'interrogatoire. Il ne présente aucun signe laissant présager qu'il pourrait attenter à ses jours ni qu'il éprouverait de la détresse psychologique. Les policiers le laissent seul pour une période d'une quinzaine de minutes. Quand ils reviennent, ils trouvent l'homme inconscient. Ils constatent toutefois qu'il respire. Appelés sur place, les ambulanciers transportent l'homme au centre hospitalier le plus près pour traitement. Il reprendra conscience à la suite de soins prodigués par le personnel médical.
Analyse du DPCP
La preuve au dossier d'enquête ne permet pas de conclure que les policiers impliqués ont fait preuve de négligence criminelle causant des lésions corporelles.
En matière de négligence criminelle, il est interdit à une personne d'accomplir un geste ou d'omettre de poser un geste que la loi exige qu'il pose, lorsque cela montre une insouciance déréglée ou téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui.
La simple négligence dans l'accomplissement d'un acte, ou le fait de ne pas remplir une obligation imposée par la loi, sont toutefois insuffisants pour conclure à la négligence criminelle. La conduite doit représenter « un écart marqué et important par rapport à la conduite d'une personne raisonnablement prudente », en l'occurrence, un policier placé dans la même situation, distinguant ainsi la faute civile de la faute criminelle.
Par ailleurs, la négligence criminelle ne constitue pas une infraction autonome. La négligence, pour être de nature criminelle, doit conduire à la mort ou à des lésions corporelles. De plus, toute forme de contribution à la mort ou aux lésions corporelles n'est pas criminelle. Pour être punissables, les gestes ou les omissions doivent avoir contribué de façon appréciable, c'est-à-dire plus que mineure aux lésions corporelles ou encore au décès d'une autre personne.
L'analyse de l'ensemble de la preuve au dossier d'enquête révèle que l'homme coopérait bien avec les policiers. En outre, il n'a pas résisté à son arrestation et n'a rien verbalisé quant à des idées suicidaires. Il apparaissait affecté par la consommation d'alcool, sans plus. Rien ne laissait présager aux policiers que l'homme pourrait agir comme il l'a fait.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales

Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
Partager cet article