/R E P R I S E -- Avis aux médias - Réaction de la CSQ - Désinformation sur la dette dans les quotidiens de Quebecor/
MONTRÉAL, le 14 mars 2012 /CNW Telbec/ - a Centrale des syndicats du Québec (CSQ) vous invite à prendre connaissance de sa réaction à l'article de désinformation rédigé par l'éditorialiste Jean-Jacques Samson, du Journal de Québec, et intitulé « Où vont vos impôts ? ».
La vérité sur la dette québécoise
La dette était de 111,5 milliards en 2004 ; elle était rendue il y a quelques jours à 245 milliards et elle augmente de 11,3 milliards par année. […] Les Québécois sont parmi les plus endettés des peuples, mais ils nagent dans le bonheur ! Pour l'instant. Car les seuls intérêts à payer sur la dette nous étouffent toujours un peu plus. Le service de la dette atteignait 7,8 milliards $ dans le budget de l'an dernier. Il est devenu le troisième poste budgétaire en importance. […] L'avenir est sombre .
J. JACQUES SAMSON, Directeur des pages Opinions, Le Journal de Montréal/Québec, Encart spécial du 13 mars 2012
La variation de la dette brute n'est pas dramatique
La dette publique est le royaume de la désinformation comme l'illustre tristement l'extrait ci-dessus truffé de faussetés, de demi-vérités et de distorsions. Il faut dire que ce sujet complexe se prête bien à toutes les manipulations.
D'emblée, l'auteur de la citation amalgame deux définitions de la dette : la dette brute du gouvernement du Québec et la dette totale du secteur public, en comparant les données se rapportant à l'une avec celles de l'autre. Cela revient à comparer des pommes avec des oranges. D'abord, les 111,5 milliards de 2003 ont été révisés depuis à 129 milliards, correspondant à 53,5 % du PIB, à la suite de diverses réformes qui ont élargi le nombre d'organismes inclus dans la comptabilité du gouvernement, avec comme corollaire l'ajout de leurs dettes respectives. En 2011, la dette brute atteint 173,4 milliards, soit 54,6 % du PIB. En termes de poids économique, la variation depuis 2003 n'est pas dramatique. Elle s'explique surtout par les effets de la récession.
Le poids économique de la dette du secteur public n'a guère varié depuis 2003
Quant à la dette du secteur public, elle comprend, outre la dette brute du gouvernement, la dette d'Hydro-Québec et des autres entreprises du gouvernement, des municipalités, des universités autres que l'Université du Québec. La dette du secteur public s'établit à 234,7 milliards en 2011, soit 74 % du PIB. Elle totalisait 178,4 milliards en 2003, soit 73,9 % du PIB. Encore là, le poids économique de la dette ainsi définie n'a guère varié.
On aura remarqué notre insistance sur les mesures relatives (en proportion de la taille de l'économie). Les chiffres absolus frappent peut-être davantage l'imagination, mais les chiffres relatifs donnent une meilleure idée de la capacité d'un État à soutenir la dette publique et facilitent les comparaisons.
Soit dit en passant, le chiffre de 245 milliards évoqué provient du « compteur de la dette » inventé par le très néolibéral Institut économique de Montréal (IEDM) dans le but de terroriser les petits enfants. Tant qu'à chercher à impressionner, l'IEDM aurait pu faire le même exercice avec la dette du gouvernement américain qui s'élève à 15 500 milliards de dollars (15,5 suivi de douze zéros).
La part des revenus consacrée au service de la dette diminue
En ce qui a trait aux intérêts sur la dette du gouvernement, ils sont passés de 6,7 milliards en 1997-1998 à 7,8 milliards en 2011-2012. La progression en 14 ans a été beaucoup moins forte que celle des revenus du gouvernement. En conséquence, la part des revenus consacrée au service de la dette a diminué de 18,8 % à 11,9 % au cours de cette période. Cette réduction de 6,9 points de pourcentage représente des économies annuelles de 4,8 milliards. Et, effectivement, le service de la dette constitue le troisième poste budgétaire, cela depuis le tournant des années 1980. Voilà toute une nouvelle !
Le Québec fait bonne figure parmi les pays de l'OCDE
Comment le Québec figure-t-il sur le plan international ? En utilisant la méthode de l'Organisation de Coopération et de Développement économiques (OCDE), qui uniformise les éléments considérés, le professeur Louis Gill a estimé la dette publique brute du Québec à 53,8 % du PIB en 2009, comparativement à 90 % en moyenne pour les pays de l'OCDE1. Le gouvernement du Québec arrivait au même résultat dans une étude datée de mars 2010, sauf qu'il y rajoutait « la part de la dette du gouvernement fédéral », ce qui avait pour effet de porter la dette totale du Québec à 94,5 % du PIB. Une absurdité s'il en est. Car à ce compte, des États relativement peu endettés comme l'Ontario, la Californie ou New York, se hissent au sommet du palmarès de l'endettement mondial quand on ajoute à leur dette locale la « quote-part » de la dette du gouvernement central. Personne ne calcule la dette des gouvernements de cette façon, sauf le Québec, pour alarmer la population. Chose certaine, ce n'est pas le tableau qu'il soumet chaque année aux autorités de réglementation des marchés financiers étrangers dans le Formulaire 18-K.
Le Québec possède des actifs financiers comme le Canada
Il faut aussi ajouter qu'à la différence de la plupart des États, le Canada comme le Québec possèdent des actifs financiers importants constitués des provisions pour les régimes de retraite publics comme le Régime des pensions du Canada (RPC) et le Régime des rentes du Québec (RRQ) ou ceux des employés des gouvernements. Comme le signalait dernièrement une étude de la Banque Nationale réalisée par l'économiste principal Marc Pinsonneault, cela contribue à réduire l'endettement brut des administrations publiques2. Le Canada en retire une image de marque. La dette nette de l'ensemble des administrations canadiennes, c'est-à-dire la dette brute moins les avoirs financiers, représente 36,6 % du PIB en 2012, comparativement à une moyenne de 66,7 % pour les pays de l'OCDE. C'est la plus faible du G-7.
La situation enviable du Québec lui vaut des taux d'intérêt avantageux
Si l'état des finances publiques était si mauvais que certains veulent le faire croire, le Québec pourrait-il emprunter aux taux avantageux actuels ? Le taux moyen d'intérêt qui s'applique aux emprunts du gouvernement est de 4,6 % pour des échéances moyennes de 11,3 ans. C'est encore loin des 35 % à 45 % exigé par les marchés financiers pour prêter à la Grèce.
Il est vrai que la dette publique augmente, mais ce n'est pas pour payer les « dépenses d'épicerie ». Les quatre cinquièmes de l'accroissement de la dette depuis la fin des années 1990 sont attribuables aux investissements engagés par le gouvernement dans ses entreprises et dans les infrastructures pour remettre en état des équipements collectifs vieillissants. L'autre cinquième s'explique par les déficits encourus ces dernières années en raison de la crise économique, mais aussi des allègements fiscaux consentis aux particuliers (950 millions en 2008) et aux entreprises (2 milliards découlant de l'abolition de la taxe sur le capital).
Au fond, les exagérations et les faussetés colportées sur l'endettement public n'ont d'autre objectif que de justifier des politiques antisociales de coupures des services publics, soi-disant dans l'intérêt des générations futures. C'est une mystification. La meilleure façon de rendre service aux générations futures, c'est encore de bâtir un pays doté de services sociaux, de services éducatifs et de santé de haute qualité, d'équipements collectifs et d'infrastructures développées et bien entretenues qui serviront de fondement social et économique solide pour la croissance future.
Pierre Beaulne, économiste
Centrale des syndicats du Québec
Profil de la CSQ
La CSQ représente plus de 190 000 membres, dont plus de 130 000 font partie du personnel de l'éducation. Elle est l'organisation syndicale la plus importante en éducation au Québec. La CSQ est également présente dans les secteurs de la santé et des services sociaux, des services de garde, du municipal, des loisirs, de la culture, du communautaire et des communications.
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1 | GILL, Louis (2010). « L'heure juste sur la dette du Québec », Économie autrement.org, (juin), p. 13, www.economieautrement.org/IMG/pdf/Gill_Dette_Heurejuste.pdf (Consulté le 14 mars 2012). |
2 | BANQUE NATIONALE (2012). « Canada : Mesurer l'endettement des administrations publiques », L'Hebdo économique, (6 février), www.bnc.ca/bnc/files/bncpdf/fr/2/HEBDOECONOMIQUE_20120206.pdf (Consulté le 14 mars 2012). |
Marjolaine Perreault
Attachée de presse, CSQ
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