Quand derrière le diagnostic psychiatrique se cachent des inégalités sociales… - 5e Journée de l'Alternative en santé mentale
MONTRÉAL, le 9 oct. 2017 /CNW Telbec/ - C'est à l'appel du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ) qu'une cinquantaine de citoyens et de citoyennes se sont réunis à Montréal pour lancer les activités entourant la Journée de l'Alternative en santé mentale. Le 10 octobre étant également la Journée mondiale de la santé mentale (OMS), les activités s'y inscrivant visent à rappeler que les inégalités sociales et les mauvaises conditions de vie sont souvent à l'origine des problèmes de santé mentale. De surcroit, les réponses offertes aux citoyens et citoyennes en situation de souffrance sont souvent inadéquates et insuffisantes, la médication étant la principale, et parfois la seule, réponse offerte.
« Les personnes qui ont des problèmes de santé mentale ont souvent des vécus marqués par la pauvreté, l'exclusion, les violences ou les abus. Leurs difficultés apparaissent souvent lors d'événements stressants. Par exemple, on pense à des conditions de travail pénibles, à un accompagnement absent lors de transitions comme le deuil ou la perte d'emploi, mais aussi à la non-reconnaissance de la discrimination ou du harcèlement, voire même à des violences subies. Les personnes ont une histoire qu'on réduit trop souvent à des symptômes, à un diagnostic et à une maladie! On médicalise leur vécu!», dénonce Anne-Marie Boucher, responsable aux communications et à l'action sociopolitique au RRASMQ.
Le soutien psychosocial en période d'austérité
Selon une étude menée par l'Institut de la statistique du Québec en 2009, la proportion des personnes laissant entendre qu'on ne répondait pas à leurs besoins d'aide en santé mentale (3,8 % de la population) représentait alors plus de 200 000 Québécois et Québécoises1. 8 ans plus tard, les impacts de la réorganisation forcée du réseau de la santé se font sentir alors que les demandes d'aide demeurent, de plus en plus, sans réponse. Dans les organismes communautaires en santé mentale, plusieurs témoignent de la difficulté de recevoir de l'accompagnement et de l'aide dans le réseau public lorsqu'ils éprouvent de la détresse psychologique, aide qui irait au-delà de la prescription de psychotropes. «Les témoignages du genre se multiplient : une personne se retrouve en état de détresse et qu'est-ce qu'on lui offre comme soutien? On la diagnostique, on la médicamente, on l'hospitalise parfois même de force : on écoute très peu ce qu'elle a à dire et ce qu'elle veut, au fond», déplore Anne-Marie Boucher.
Les plus fortunés se tourneront alors vers le milieu privé pour une thérapie, certains seront dirigés vers le milieu communautaire, milieu qui se retrouve à jouer le rôle de filet de sécurité pour un réseau public mis à mal. Or, le rapporteur spécial de l'ONU, Dainius Puras, déposait en mars 2017 un Rapport soulignant que de «prescrire des psychotropes non pas parce qu'ils sont indiqués et nécessaires, mais plutôt par manque d'une prise en charge efficace sur les plans psychosocial et de la santé publique, est incompatible avec le droit à la santé2».
Les impacts de ce modèle de réponses en santé mentale sont nombreux : sur-prescription de médication psychotrope, détresse psychologique chez les professionnels de la santé, intervenants sociaux agitant la sonnette d'alarme, travailleurs du communautaire répondant à des demandes d'aide en progression exponentielle. Une action structurelle forte sur les déterminants sociaux de la santé mentale nous semble, plus que jamais, essentielle : réinvestissement massif dans les services publics et les programmes sociaux, financement adéquat de l'action communautaire autonome, réduction des inégalités par une fiscalité progressive, prévention de la violence faite aux femmes et aux enfants.
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1 Enquête p.39
2 Assemblée générale des Nations Unies, mars 2017, Rapport du Rapporteur spécial sur le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, p.20.
L'Alternative communautaire en santé mentale, toujours essentielle
Dans cette situation, les ressources alternatives en santé mentale sont et demeurent des espaces essentiels pour les personnes et les communautés. Elles accueillent les personnes sans égard au diagnostic, leur offre de l'écoute, des activités d'émancipation, d'apprentissage, d'entraide et de participation sociale. Ce peut être un lieu ouvert de jour ou de soir, un lieu d'hébergement, un centre de crise. L'Alternative en santé mentale porte attention aux déterminants sociaux de la santé et propose, aux citoyens et citoyennes du Québec, de se solidariser pour construire une société plus égalitaire, plus accueillante des vulnérabilités diverses et ouverte à la différence, une société où le droit à la santé serait respecté pleinement.
« J'ai une histoire » : un appel à témoigner et à agir
Cette année, la Journée de visibilité de l'Alternative en santé mentale reprend le thème « J'ai une histoire. Pourquoi en faire une maladie? Le site internet de la campagne peut être visité par les citoyens soucieux d'en connaître davantage sur les liens entre conditions de vie et santé mentale : www.jaiunehistoire.com, ou souhaitant partager leur témoignage. Il est également possible de participer à des actions citoyennes qui se tiendront notamment à Longueuil, Terrebonne, Joliette, Richmond, St-Jérôme, Gaspé, St-Flavien, Rivière-du-Loup, Lac-Mégantic, Cowansville, Valleyfield, Rimouski et Témiscouata-sur-le-lac. Le calendrier des activités prévues se trouve sur le site de la campagne.
www.jaiunehistoire.com
www.rrasmq.com
SOURCE Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ)
Anne-Marie Boucher, responsable aux communications et à l'action sociopolitique du RRASMQ, (514) 984-2349, [email protected]
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