Institut du Québec - Mémoire pour la planification de l'immigration 2026-2029 : QUELQUES PISTES D'ACTION POUR UNE GESTION STRATÉGIQUE DES SEUILS D'IMMIGRATION
MONTRÉAL, le 1er oct. 2025 /CNW/ - Dans le cadre des consultations pour la planification de l'immigration 2026-2029, le gouvernement du Québec affiche clairement son objectif : réduire l'immigration. Si la volonté de mieux encadrer les politiques migratoires est légitime, le choix de diminuer simultanément l'immigration permanente et temporaire (travailleurs, étudiants, demandeurs d'asile) risque toutefois de créer de sérieux déséquilibres. C'est ce que met en lumière l'avis de l'Institut du Québec (IDQ) sur la question, rendu public aujourd'hui.
Au cours des dernières années, c'est surtout le nombre de permis temporaires qui a explosé au Québec, si bien qu'on y retrouve aujourd'hui un nombre record de personnes présentes sous ce statut. Du nombre, certaines repartiront comme prévu, d'autres ne verront pas leur permis renouvelé, mais selon la logique même de la stratégie gouvernementale, une part importante d'entre elles devrait à terme obtenir un statut de résident permanent.
Or, le gouvernement propose de réduire de façon marquée le seuil d'admissions permanentes : de 24 % à 58 % selon les différents scénarios présentés dans le cahier de consultation. « Le risque avec cette approche, soutient Emna Braham, présidente-directrice générale de l'IDQ, n'est pas de devoir refuser la permanence à tous les résidents temporaires, mais bien de voir partir des candidats hautement qualifiés qui ont déjà fait leurs preuves au Québec. Notre recherche démontre que ces immigrants qualifiés, arrivés d'abord comme temporaires, s'intègrent particulièrement bien : ils sont plus nombreux à occuper des emplois à la hauteur de leurs qualifications et à être bien rémunérés. »
Mieux gérer les transitions vers la résidence permanente
Ainsi, parmi les quelque 40 000 détenteurs de permis de travail postdiplômes, - accordés aux finissants étrangers qui souhaitent s'installer au Québec après leurs études -, une part importante répond assurément aux critères de l'immigration économique priorisée par le gouvernement du Québec, soit jeunes, à l'emploi et hautement qualifiés. Or, avec des seuils d'immigration permanente économique qualifiée abaissés entre 15 000 et 27 000 admissions, seule une minorité d'entre eux pourraient faire du Québec leur patrie et ce, alors qu'ils représentent des talents clés pour stimuler notre économie.
L'histoire est tout aussi préoccupante pour les demandeurs d'asile dont l'enjeu est plutôt d'ordre humanitaire. À ce chapitre, Québec compte près de 186 000 personnes en attente d'une décision, dont environ 80 % pourraient obtenir le statut de réfugié. Or, avec des seuils d'acceptation annuels de réfugiés reconnus sur place fixés à moins de 5 000 personnes, il faudrait plusieurs décennies pour régulariser uniquement ceux qui sont déjà présents sur le territoire.
Rehausser les seuils d'immigration permanente momentanément
Face à ces pressions, l'IDQ recommande d'agir sur deux leviers : réduire graduellement l'immigration temporaire tout en rehaussant, pour une période limitée, le seuil d'immigration permanente au-delà des 60 000 admissions actuelles. Pour plus de cohérence, ce niveau devrait être précisé après l'analyse des goulots d'étranglement entre statuts temporaires et permanents. Une telle mesure ne viserait pas à accroître l'immigration globale ou à répondre aux besoins des employeurs, mais plutôt à faciliter la transition des personnes déjà établies au Québec et à régulariser la situation de milliers de travailleurs, d'étudiants et de demandeurs d'asile. Une fois ces pressions atténuées, les seuils permanents pourraient être ramenés à un niveau inférieur.
Des cibles d'immigration temporaire à mieux encadrer
Autre enjeu soulevé par la stratégie de réduction de l'immigration : la façon même dont les cibles d'immigrants temporaires sont établies. Plutôt que de s'appuyer sur le nombre de permis à délivrer ou à renouveler chaque année, les objectifs ont été fixés en fonction d'une prévision du nombre de résidents temporaires présents en 2029. Or, ce seuil dépend de facteurs difficiles à anticiper, comme le nombre de départs volontaires, les renouvellements de permis ou encore les décisions prises par Ottawa. Le risque? Que Québec et Ottawa doivent modifier fréquemment les règles d'octroi ou de renouvellement de permis afin de respecter la trajectoire annoncée, créant ainsi de l'incertitude tant pour les immigrants, les entreprises que pour les établissements d'enseignement.
« Réduire l'immigration ne peut se résumer à une question de seuils, rappelle Emna Braham. Dans cette période de transition, il est essentiel d'assurer une stabilité réglementaire et d'éviter de modifier les règles du jeu en cours de route. Sans cela, la confiance s'érode, la croissance se fragilise et l'intégration des talents devient plus difficile. Trois enjeux fondamentaux pour assurer la prospérité du Québec et le maintien de la cohésion sociale. »
Pour en savoir plus
Téléchargez le mémoire : Avis de l'Institut du Québec - Planification de l'immigration au Québec pour la période 2026-2029
À propos de l'Institut du Québec
L'Institut du Québec est un organisme à but non lucratif qui axe ses recherches et ses études sur les enjeux socioéconomiques auxquels le Québec fait face. Il vise à fournir aux autorités publiques et au secteur privé les outils nécessaires pour prendre des décisions éclairées, et ainsi contribuer à bâtir une société plus dynamique, compétitive et prospère. www.institutduquebec.ca | @InstitutduQC
SOURCE Institut du Québec

Source : Simon Savard, Économiste principal et directeur adjoint, 418 637 0817-- [email protected]
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