Fin de 25 ans de litige sur le tabac: Les provinces doivent remédier aux lacunes de l'entente par des mesures audacieuses et des investissements visant à prévenir davantage de dépendances et de maladies
MONTRÉAL and EDMONTON, AB, le 27 août 2025 /CNW/ - Alors que le tribunal ontarien s'apprête à conclure le processus juridique relatif aux fabricants de tabac s'étant placés sous la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) - ce qui déclenchera le processus de paiements aux créanciers et aux victimes de l'industrie - la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac et Action on Smoking & Health (ASH Canada) demandent aux gouvernements provinciaux et territoriaux d'atténuer les immenses failles de l'entente.
Les gouvernements provinciaux et territoriaux n'ont pas forcé l'inclusion d'éléments visant la prévention de nouveaux dommages dans l'entente finale avec les fabricants de tabac. C'est pourquoi les groupes de santé exhortent ces gouvernements à moderniser leurs stratégies de lutte contre le tabagisme en adoptant des mesures audacieuses visant à prévenir de nouveaux torts tout et en assurant le financement adéquat de ces efforts, notamment à l'aide d'une petite partie des retombées financières découlant de l'entente. Les mesures envisageables comprennent l'interdiction de toutes les incitations commerciales pour leur produits addictifs, un contrôle des prix, des permis tarifiés pour chaque étape du processus de commercialisation, l'interdiction des ventes en ligne et interprovinciales, un contrôle sur la densité des points de vente et un soutien plus généreux des programmes et aides thérapeutiques pour la cessation.
Absence de mesures correctives
« L'accord négocié par les provinces ne prévoit aucune mesure pour empêcher des futurs torts aux victimes, ni d'alléger le fardeau sur le système de santé que provoque ces fabricants de tabac avec leurs produits », dit Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. À l'opposé, en 1998, l'accord américain sur le tabac (US Tobacco Master Settlement Agreement) comprenait plusieurs mesures structurantes, telles que l'interdiction de la commandite et des panneaux publicitaires extérieurs, des restrictions sur la vente de tabac aux mineurs, des avertissements plus sévères sur les paquets de cigarettes et la création de l'initiative «Truth » dotée d'un budget de 365 millions US$ qui réalise des campagnes d'action publique contre le tabagisme et de dénormalisation de l'industrie du tabac - des éléments explicitement exclus de l'entente canadienne.
« Il n'y aucune mesure structurante freinant la vente et la promotion des produits mortels et toxicomanogènes de ces entreprises, aucune mesure pour limiter le recrutement de nouvelles victimes, et pas un sou pour aider les fumeurs à arrêter. En fait, l'accord permet aux fabricants de tabac de continuer à fonctionner comme avant, sans aucune restriction sur leurs activités », ajoute-t-elle.
Actions nécessaires pour mitiger l'accord favorable à l'industrie
« Maintenant que les négociations sont terminées et que les paiements aux créanciers débuteront, la balle est carrément dans le camp des gouvernements provinciaux et territoriaux pour remédier à ces déficiences. Les gouvernements devraient bonifier leurs stratégies antitabac en adoptant de nouvelles mesures audacieuses visant à réduire le tabagisme et le vapotage », déclare Les Hagen, directeur général d'ASH Canada. « La plupart des stratégies provinciales de lutte contre le tabagisme ont subi d'importantes coupures budgétaires au cours des 10 à 15 dernières années, ce qui entrave le renouvellement des efforts dédiés à réduire le tabagisme. L'accord n'empêchera pas la création de victimes dans l'avenir - sauf si les gouvernements redoublent leurs efforts pour réduire et prévenir le tabagisme à l'aide de nouvelles mesures en utilisant une partie des sommes découlant de l'entente pour bien financer te telles initiatives. »
« Soyons clairs. Ce sont les fumeurs actuels et de l'avenir qui généreront les revenus qui permettront aux fabricants de tabac de payer les gouvernements. En effet, selon cette entente viciée, le gros des montants que pourraient encaisser les gouvernements dépend de la continuité des ventes de cigarettes! Les gouvernements provinciaux devraient rapidement éliminer cette apparence de conflit d'intérêts afin de clairement signaler à leurs citoyens quelles sont leurs priorités », insiste Mme Doucas. « Sans une action audacieuse et immédiate, les générations futures paieront le prix de cet accord avec plus de dépendance, plus de maladies et un fardeau plus lourd sur le système de santé. »
Des miettes étalées sur des décennies
L'entente finale prévoit le versement de 32,5 milliards de dollars à l'ensemble des créanciers, dont 24,7 milliards $ aux gouvernements provinciaux et territoriaux et 7,7 milliards $ aux victimes du Québec et d'ailleurs au pays.
« Alors que les gouvernements provinciaux et territoriaux se vantent des importantes sommes qu'ils tireront de l'industrie du tabac, ces montants représentent moins de 5 % des 500 milliards de $ que l'industrie de tabac leur devait, selon eux, pour des décennies de coûts de santé liés au tabagisme », explique M. Hagen.
De plus, mise à part le paiement forfaitaire initial, les sommes subséquentes que recevront les provinces seront beaucoup plus modeste. Dans son rapport semestriel du 31 juillet 2025, British America Tobacco signale que les paiements aux provinces et territoires pourraient s'étaler sur plus de 40 ans. En effet, advenant le déclin du tabagisme à son rythme actuel et autres facteurs relativement stables, les paiements annuels reçus en 2029 sont estimés à 245 millions $ pour le Québec et à 115 millions $ pour l'Alberta - nettement inférieur aux 1,2 milliard $ en coûts annuels directs de soins de santé liés au tabagisme au Québec et aux plus de 500 millions $ en Alberta.
Aucune annonce de somme allouée à la réduction du tabagisme.
À ce jour, aucune province n'a annoncé son intention d'intensifier de manière significative ses efforts de réduction du tabagisme ni d'affecter une partie des fonds du règlement à de telles initiatives. Or, les requêtes initiales des gouvernements soulignaient impact immense du tabagisme sur la santé publique ainsi que le comportement négligent et prédateur des fabricants de tabac en matière de marketing. L'absence de mesures correctives dans l'entente va à l'encontre des propos audacieux de leurs requêtes.
« Sans l'introduction de nouvelles mesures limitant la capacité de l'industrie à recruter des nouvelles clientèles et sans financement adéquat pour appuyer de telles initiatives, l'accord négocié par les provinces et les territoires ne sera rien d'autre qu'une gigantesque saisie d'argent qui ne fera rien pour protéger les générations futures contre les pratiques prédatrices de ces compagnies », conclut Madame Doucas.
Le tabagisme tue plus de 46 000 victimes chaque année, soit plus que toutes les autres formes de consommation de substances combinées. Pour chaque personne qui meurt du tabagisme, 20 autres souffrent de maladies causées par le tabagisme, soit plus de 900 000 Canadiens.
SOURCE Coalition québécoise pour le contrôle du tabac

Flory Doucas - Coalition québécoise pour le contrôle du tabac - 514-515-6780; [email protected]; Les Hagen - Action on Smoking & Health - 780-919-5546; [email protected]
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