D'après les dernières estimations préliminaires de l'Institut climatique du Canada, les émissions nationales de gaz à effet de serre ont stagné en 2024 et pourraient repartir à la hausse sans remaniement coordonné des politiques.
OTTAWA, ON, le 18 sept. 2025 /CNW/ - Les émissions du Canada ont stagné en 2024, selon les dernières estimations préliminaires des émissions nationales de 440 mégatonnes, un projet de l'Institut climatique du Canada. Se chiffrant à 694 mégatonnes (Mt) d'équivalent dioxyde de carbone, elles étaient presque aussi élevées qu'en 2023. Les données sont formelles : les progrès sont au point mort.
Par ailleurs, si la tendance se maintient, le Canada ne pourra désormais plus atteindre sa cible de réduction des émissions à l'horizon 2030. C'est que les politiques climatiques s'affaiblissent, malgré des années de feux de forêt perturbateurs et dispendieux, d'événements météorologiques extrêmes et d'autres catastrophes climatiques qui menacent la sécurité et l'abordabilité au pays.
Les estimations préliminaires de 2024 révèlent que les émissions du Canada se situent à peine à 8,5 % sous les niveaux de 2005, un chiffre presque identique à celui de 2023. Bien que certains secteurs aient continué à se décarboniser, comme l'électricité et les bâtiments, les progrès étaient somme toute modestes et largement contrés par la hausse dans le secteur pétrogazier, plus particulièrement dans la production de sables bitumineux. Dans l'ensemble, les émissions pétrogazières, qui représentaient 31 % du total national, ont augmenté de 1,9 %.
D'après la tendance actuelle, les émissions du Canada ne tomberaient que 20 à 25 % sous les niveaux de 2005 d'ici 2030, bien en deçà de la cible de 40 à 45 % inscrite dans la loi, qui aurait été réalisable si les politiques climatiques annoncées par les différents ordres de gouvernement avaient vu le jour comme prévu. Pour atteindre cette cible, il faudrait réduire les émissions d'environ 40 Mt par année, ce que la situation actuelle ne permet aucunement.
Le recul récent des politiques fédérales et provinciales compromet les progrès du Canada dans la lutte climatique ainsi que sa concurrentialité dans un contexte de sobriété en carbone. Il est ici question de l'élimination de la tarification du carbone pour les consommateurs, des retards dans les politiques nationales et provinciales sur les véhicules électriques et de l'affaiblissement de la tarification du carbone industriel dans plusieurs provinces. En outre, avec les tendances du marché - par exemple l'expansion planifiée de la production de gaz naturel liquéfié -, l'intensité d'émissions semble vouloir reprendre de plus belle. Même l'objectif à l'horizon 2035 est en péril.
Afin de protéger sa population des changements climatiques et de respecter ses engagements internationaux et ses cibles officielles, le Canada devra procéder à une grande refonte de ses politiques fédérales, provinciales et territoriales. Les ordres de gouvernement pourraient se rallier autour de projets comme la modernisation de la tarification du carbone industriel, l'achèvement des nouveaux règlements sur le méthane pétrogazier, l'investissement dans l'électricité propre, et l'abordabilité et la disponibilité de carburants et de véhicules plus propres.
QUELQUES FAITS EN BREF
- Les émissions 2024 du Canada sont estimées à 694 mégatonnes d'équivalent dioxyde de carbone (Mt), soit 8,5 % sous les niveaux de 2005.
- Pétrole et gaz : Les émissions ont augmenté de 1,9 %, principalement en raison de la hausse de 3,4 % dans la production de sables bitumineux.
- Transport : Les émissions ont diminué de 0,7 %, poursuivant leur tendance modeste à la baisse.
- Bâtiments : Les émissions ont baissé de 1,2 %, une diminution inférieure à celle de l'année précédente expliquée par un hiver plus rude.
- Industrie lourde : Les émissions sont tombées de 1,2 %, ce qui laisse supposer une décarbonisation générale malgré des résultats inégaux dans les différents sous-secteurs.
- Électricité : Les émissions ont diminué de 1,9 %, atteignant 59 % sous les niveaux de 2005 et soulignant par le fait même l'importance de la mise au diapason des politiques fédérales et provinciales et des avancées technologiques.
- Avec les changements climatiques, les feux de forêt se font de plus en plus grands, chauds et fréquents. En 2025, ils ont brûlé un total de 8,7 millions d'hectares de forêt, soit deux fois et demie l'île de Vancouver. Des zones habituellement dépourvues de feux de forêt, y compris dans le Canada atlantique, font maintenant face à des conditions de sécheresse record et à des risques croissants d'incendie.
- Les dommages causés par les phénomènes météorologiques extrêmes ont fait de 2024 l'année la plus coûteuse de l'histoire du Canada, avec des pertes assurables de plus de 8,5 millions de dollars.
CITATIONS
« Après un autre été marqué d'horribles feux de forêts, d'événements météorologiques extrêmes et de coûts grandissants, nous sommes en droit de nous attendre à ce que les gouvernements redoublent d'efforts pour combattre les changements climatiques, et non qu'ils relâchent la pression. Pourtant, les dernières données sur les émissions confirment que 20 ans de progrès climatique pourraient s'envoler sans refonte des politiques. Alors que les émissions stagnent et que les principales politiques climatiques reculent, le Canada voit sa cible à l'horizon 2030 s'éloigner. Et plus nous tarderons à rectifier le tir, plus il nous en coûtera. »
- Rick Smith, président, Institut climatique du Canada
« L'année 2025 sera décisive pour le climat. Alors que les politiques climatiques s'essoufflent, tout indique que les émissions nationales pourraient repartir à la hausse. Après des années de dur labeur des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les émissions semblent vouloir croître, ce qui rendrait inaccessible l'objectif pour 2030. Les décisions de cette année jetteront les bases pour la suite. Alors que les dommages climatiques se multiplient et que les tarifs de Trump menacent la stabilité et la concurrentialité du Canada, les différents ordres de gouvernements doivent s'unir et miser sur une coopération judicieuse à long terme. »
- Dave Sawyer, économiste principal, Institut climatique du Canada
RESSOURCES
- Base de données | Estimations préliminaires des émissions nationales 2024
- Analyse | La tendance risque de s'inverser avec le ralentissement des politiques climatiques, d'après les estimations préliminaires des émissions de 2024
- Déclaration aux médias | À l'heure de la rentrée parlementaire, la protection de la population et de l'économie canadiennes contre les changements climatiques doit être une priorité absolue
440 mégatonnes est un projet de l'Institut climatique du Canada, l'organisme de recherche sur les politiques climatiques par excellence au pays. Il produit des analyses rigoureuses, des modélisations économiques et des études approfondies, et ses expertes et experts sont prêts à formuler des commentaires sur des sujets comme la concurrentialité dans un contexte de sobriété en carbone, les coûts des catastrophes climatiques, les progrès du pays quant à la réduction des émissions et les politiques prioritaires pour le nouveau gouvernement fédéral.
SOURCE L'Institut climatique du Canada

MÉDIAS : Claudine Brulé (heure de l'Est), 514 358-8525, [email protected]; Krystal Northey (heure des Rocheuses), 226 212-9883, [email protected]
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