Enquête indépendante sur l'événement survenu à Val-des-Sources le 29 mai 2023 : motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée
QUÉBEC, le 9 juin 2025 /CNW/ - Les procédures judiciaires étant terminées, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) expose les motifs l'ayant mené à conclure, dans son communiqué intérimaire du 23 novembre 2023, que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant les blessures subies par un homme à Val-des-Sources le 29 mai 2023.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révélait la commission d'infractions criminelles. Après quelques tentatives pour la joindre, la personne blessée n'a pu être informée des motifs de la décision.
Événement
Le 29 mai 2023, le vol d'un sac contenant notamment des pièces d'identité et des cartes bancaires survient. Un homme, connu des policiers, en est le suspect.
Les policiers se rendent à proximité de sa résidence afin de l'interpeller. Or, ce dernier prend la fuite à pied. Durant près de 25 minutes, l'homme commet plusieurs introductions par effraction dans différents appartements du secteur afin de se cacher des policiers et demander de l'aide aux résidents.
Les résidents collaborent toutefois avec les policiers qui sont à ses trousses. Ceux-ci obtiennent ainsi des informations quant aux déplacements de l'homme dans le secteur résidentiel.
Ce dernier est finalement rattrapé et menotté. Pour ce faire, les policiers ont recours à l'emploi d'une certaine force physique et au poivre de Cayenne car l'homme refuse d'obtempérer aux ordres.
À un certain moment durant l'arrestation, les policiers s'aperçoivent que l'homme a une lacération importante à la jambe et que son état se dégrade; il perd notamment conscience durant quelques instants.
Dès lors, des soins lui sont prodigués. L'homme est ensuite transporté d'urgence en ambulance vers l'hôpital afin d'être pris en charge.
Analyse du DPCP
L'intervention était légale. L'article 48 de la Loi sur la police prévoit que les policiers ont pour mission de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime.
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25(1) du Code criminel sont remplies.
L'article 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
La preuve révèle que les policiers devaient intervenir. L'homme a clairement refusé de collaborer en s'enfuyant à la vue de ces derniers. En outre, il s'est introduit illégalement chez plusieurs résidents du secteur. Les policiers étaient donc bien fondés à procéder à son arrestation et à employer la force nécessaire à cette fin. Les déclarations des policiers impliqués et des témoins civils, ainsi que l'examen de la scène, démontrent que la force employée par les policiers était à la fois raisonnable et proportionnelle eu égard à l'ensemble des circonstances.
En sus, aucun élément de preuve ne permet de conclure que la blessure grave subie par l'homme résulte des agissements des policiers. D'ailleurs, ce dernier a été rencontré par les enquêteurs et il reconnaît que cette blessure est survenue lors de sa fuite et non lors du menottage. Il appert également que les policiers lui ont porté secours dès le moment où ils ont constaté que son état de santé se détériorait.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales

Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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