Séminaire nordique autochtone au Mushuau-nipi : Moment de vérité pour la Maison du caribou et la culture Innue English
BAIE-COMEAU, QC, le 28 août 2012 /CNW/ - Rassemblés aux abord de la rivière George pour le 8e Séminaire nordique autochtone organisé par les Amis du Mushuau-nipi, des Innus de partout au Québec et au Labrador, des scientifiques québécois, des représentants de groupes environnementaux, des membres de la société civile et représentant du gouvernement se sont prononcés sur le thème «Un caribou en situation précaire, comment rallier conservation et savoir autochtone?»
Un constat évident s'en dégage : la survie du caribou migrateur est intimement liée à la vitalité de la culture traditionnelle Innue. Cet animal est effectivement au cœur des traditions, de la vie spirituelle, de la connaissance et du mode de vie ancestral et actuel des Innus du Québec et du Labrador. À ce titre, le lieu mythique du Mushuau-nipi, véritable foyer culturel où se déroulait le séminaire, apparaît comme un endroit de contact privilégié avec tout ce mode de vie.
Or, en plein Séminaire, les participants prenaient connaissance des résultats du dernier inventaire du caribou de la rivière George réalisé par le Ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Le troupeau de la rivière George, qui comptait près de 800 000 individus il y a vingt ans, 385 000 en 2001 et, encore 74 000 en 2010, est en chute libre et passe aujourd'hui à peine la barre des 27 000 individus. « Ce nombre continuera de baisser et, bien que ce cycle soit historiquement surtout d'ordre naturel, les conditions actuelles, notamment l'accroissement de l'empreinte humaine sur l'habitat du caribou, fait en sorte que nul ne peut prédire le temps qu'il prendra à se rétablir ou même s'il se rétablira un jour » affirme Serge Couturier, spécialiste de l'étude des caribous participant au séminaire.
Les populations de caribous migrateurs sont connues pour être cycliques, affichant naturellement des hauts et des bas dans les effectifs d'un troupeau. Ainsi, il y avait très peu de caribous migrateurs au Québec-Labrador entre 1900 et 1950, puis les nombres de caribous se sont mis à augmenter rapidement jusqu'à devenir le plus grand troupeau au monde vers la fin des années 1980. La différence aujourd'hui est que l'important développement que connaît le Nord-du-Québec, combiné avec une capacité de chasse commerciale, sportive et autochtone beaucoup plus forte que dans le passé, ont le potentiel d'affecter de façon déterminante le rétablissement de l'espèce lorsqu'elle est dans une période de faibles effectifs. Le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador ont d'ailleurs récemment interdit la chasse sportive et commerciale du troupeau de la Rivière George.
L'une des convergences entre les savoirs scientifiques et autochtones qui est apparue durant le séminaire est la présence d'une grande zone connue comme la principale aire de mise bas du troupeau de la George pour les scientifiques, ou comme l'Atikassi (Maison du caribou) pour les Innus, où le caribou a tendance à se retraiter durant les décennies difficiles comme c'est le cas présentement. Cette grande zone, couvrant approximativement 75 000 km2, est située dans l'extrême Nord-Est du Québec et inclus le Mushuau-nipi et une partie du Labrador.
La Maison du caribou mérite maintenant toute notre attention et devient un territoire clé pour la conservation de l'espèce et pour la préservation de tout un mode de vie. Les participants du Séminaire nordique autochtone ont d'ailleurs pu observer sur place quelques centaines de caribous durant les dernières semaines, témoignant de la présence de l'espèce dans son lieu de retraite.
Suite à ce constat, les participants du Séminaire s'entendent sur le fait que la Maison du caribou mérite une reconnaissance en plus d'une planification interprovinciale et intergouvernementale concertée visant la préservation du caribou, définie dans un code de pratique stricte pour les activités de développement économique et de chasse.
Jacques Gauthier, chasseur Innu et ancien chef de Matimekush Lac-John, s'est exprimé au séminaire « La priorité devrait être accordée à une chasse autochtone réduite, prenant la forme d'un prélèvement culturel permettant la sauvegarde de la harde tout en assurant également le maintien et le développement des compétences traditionnelles chez les Innus et en particulier chez nos jeunes. En ce sens, j'ai peut-être chassé ici au Mushuau-nipi mon dernier caribou».
Serge Ashini Goupil, chasseur Innu et conseiller en développement durable mentionne «La situation est critique. Les décisions qui devront être prises rapidement nécessiteront un leadership particulier des Premières Nations sur ce dossier, sous l'angle de la responsabilité culturelle pour l'intendance du territoire et des espèces qui y habitent. Pour qu'il y ait un changement dans la pratique individuelle de prélèvement du caribou, il faudra un leadership très déterminé et patient de la part des chefs des communautés et des chefs de chasse, en plus d'une meilleure information sur la situation diffusée dans les communautés autochtones du Québec et du Labrador».
À souhaiter, ont conclu les participants au Séminaire, que l'enjeu de la préservation de la Maison du caribou soit un lien unissant entre tous les Innus du Québec et du Labrador pour se mobiliser et prendre position de façon unanime.
Les Amis du Mushuau-nipi permettent à la société civile, les gouvernements et les Premières Nations, de développer une connaissance du monde des Premières Nations. Ils favorisent le partage culturel et l'implication sur le territoire, dans le but d'en voir émerger les futurs leaders.
Le Mushuau-nipi (lac de la terre sans arbres) est situé sur la passe migratoire du troupeau de caribous de la Rivière George (56e parallèle), à 250 kilomètres au nord-est de Schefferville. Véritable foyer culturel de la Nation Innu depuis plusieurs milliers d'années, ce n'est pas un hasard si ce secteur fait aussi partie de la Maison du caribou. Le Mushuau-nipi est considéré comme un site archéologique d'importance nationale et un lieu vital dans l'histoire des Innus et des Naskapis du Québec et du Labrador, en lien avec la chasse aux caribous.
Merci à nos partenaires : La huitième édition du Séminaire nordique a été réalisée grâce à une contribution financière de la part du Gouvernement du Québec, Rio Tinto IOC et New Millennium Iron Corp.
SOURCE : Les Amis du Mushuau-nipi
1 418 609 0491
Serge Ashini Goupil
Les Amis du Mushuau-nipi
Partager cet article