Projet de loi C-68 - Enfin des dispositions législatives pour protéger les communautés de pêcheurs au Canada
Lettre ouverte publiée dans le Hill Times le 31 Octobre 2018 par Melanie Sonnenberg
GRAND MANAN, NB, le 8 nov. 2018 /CNW/ - À la fin juin, tout juste avant de suspendre ses travaux pour l'été, la Chambre des communes a transféré au Sénat un projet de loi (C-68) visant à modifier la Loi sur les pêches, marquant ainsi un tournant dans l'histoire des pêches au Canada.
À l'insu de la plupart des gens, le vote de la Chambre des communes est venu couronner vingt ans d'efforts incessants pour promouvoir l'adoption d'une loi par le Parlement afin de protéger les pêcheurs propriétaires-exploitants, qui forment le tissu économique des communautés côtières.
Les propriétaires-exploitants du secteur des pêches sont la classe moyenne des régions côtières au Canada; ce sont ces femmes et ces hommes des communautés côtières qui vivent de la pêche et qui possèdent leur propre bateau et en assurent l'exploitation et l'entretien. Ce sont eux aussi qui capturent la majeure partie du poisson au pays et qui définissent, par le fait même, la pêche au Canada.
Les pêcheurs propriétaires-exploitants sont toutefois bien plus qu'une toile de fond pittoresque pour les brochures touristiques.
Dans les communautés côtières de la région de l'Atlantique, du Québec et de la Colombie-Britannique, nos bateaux sont en fait de petites entreprises qui emploient des milliers de travailleurs et qui achètent des fournitures et des services, réinjectant ainsi dans l'économie locale des millions de dollars tirés de la pêche. Ensemble, nous sommes le principal employeur du secteur privé dans les communautés côtières du pays et l'incarnation méconnue de la réussite brillante de la politique canadienne des pêches sur le plan socioéconomique.
La population du centre du Canada l'ignore peut-être, mais les pêches canadiennes sont prospères.
En 2017, la valeur de nos exportations de poissons a dépassé les 6,8 milliards de dollars, soit plus du double de ce qu'elle était en 2008. Depuis cette année-là, nos pêches affichent des bénéfices remarquables année après année. Les principaux facteurs à l'origine de cette hausse sont la bonne gestion des pêches, une augmentation de la production d'espèces comme le homard (un effet positif des changements climatiques), l'excellente qualité de nos produits et la diversification, qui nous a libérés de notre dépendance envers le marché américain et nous a ouvert les portes de la Chine, avide de produits de la mer de qualité supérieure.
L'augmentation de la production de homards, moteur économique de ma propre communauté, illustre parfaitement ces tendances. Depuis 2004, les débarquements de homards et le prix à la livre payé aux pêcheurs ont plus que doublé, ce qui a profondément transformé les perspectives d'avenir pour les pêcheurs de homard et leurs communautés. Résultat : la pêche parvient à conserver ses travailleurs et fait un puissant contrepoids à l'attrait qu'exercent les champs pétrolifères de l'Alberta.
Grâce à la politique gouvernementale actuelle, la pêche du homard est, sur le papier, réservée aux propriétaires-exploitants, ce qui signifie que le titulaire du permis doit être le capitaine du bateau et diriger les activités de pêche. Qui plus est, les règles en vigueur interdisent l'intégration verticale; autrement dit, les entreprises de transformation ne peuvent détenir elles-mêmes de permis de pêche du homard.
Faire en sorte que les retombées de la pêche au Canada profitent aux communautés et aux gens qui vivent de la pêche est une politique tout à fait sensée. Cela veut dire utiliser les ressources marines du pays pour créer et préserver de bons emplois là où c'est le plus nécessaire : dans les petites communautés rurales et éloignées. C'est ce qu'est la durabilité.
Dans de nombreux villages de pêcheurs, toutefois, une visite au quai permet de constater que des bateaux sont sous le contrôle de sociétés. Pour nos communautés, les conséquences de cette situation ne sont que négatives : effritement du pouvoir de négociation et des prix payés aux pêcheurs; affaiblissement de la concurrence entre les transformateurs; diminution des emplois à certains endroits; et conflits entre les communautés et entre les provinces.
Le projet de loi C-68 vise notamment à empêcher qu'un contrôle de la part des sociétés fragilise nos communautés. Il permettra de restaurer l'intégrité de nos politiques des pêches en établissant clairement que le ministre des Pêches a le pouvoir de prendre des décisions et d'adopter des politiques pour protéger les pêcheurs et les communautés qui en dépendent.
Notre fédération rend hommage aux parlementaires qui, au sein du comité des pêches et de la Chambre, ont travaillé ensemble à traduire nos demandes en mesures législatives. Nous sommes impatients de voir le projet de loi C-68 adopter par le Sénat et de retourner bientôt à Ottawa pour la sanction royale.
Melanie Sonnenberg, présidente de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, habite et travaille à l'île Grand Manan, au Nouveau-Brunswick.
SOURCE Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie
O'neil Cloutier, 418 782-6028, [email protected]
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